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Conférence internationale sur « Réussir l’Éducation en Afrique : l’enjeu des langues »

Le Secrétaire général de la Francophonie, M. Abdou Diouf, le ministre de l’Éducation nationale de la France, M. Vincent Peillon à l’ouverture de la conférence

Le Centre international d’études pédagogiques (CIEP) a organisé les 27 et 28 mars 2014, à Sèvres, une Conférence internationale en association avec d’autres partenaires, parmi lesquels l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique (ADEA), la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN), l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le Partenariat mondial pour l’éducation (PME), l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), la Direction du développement et de la coopération (DDC) de la Confédération suisse, le ministère français des affaires étrangères et l’Agence française de développement (AFD).

Les objectifs de cette rencontre étaient de présenter des exemples de politiques linguistiques mises en œuvre dans l’enseignement scolaire dans l’ensemble de l’Afrique, de comparer les acquis des élèves selon les différentes zones linguistiques et de réfléchir aux besoins en formation des enseignants en contexte plurilingue pour améliorer la qualité de l’enseignement. Les principaux bailleurs pour l’éducation en Afrique ont été invités à présenter leurs objectifs pour le développement des systèmes éducatifs africains et à voir dans quelle mesure ils peuvent prendre en compte les besoins liés aux questions linguistiques dans leur politique d’appui aux États.

Au cours de cette rencontre, le Secrétaire général de la CONFEMEN a fait une communication qui a porté sur le thème : «Systèmes éducatifs et multilinguisme en Afrique subsaharienne». Après avoir présenté les principales caractéristiques des systèmes éducatifs des pays africains au sud du Sahara, le Secrétaire général a posé la problématique des langues d’enseignement en soulignant que dans la plupart de ces pays, les enseignements et les apprentissages se font dans une autre langue que les langues nationales.

Faisant le constat général de l’absence de politiques linguistiques visant à valoriser les langues nationales, KI Boureima Jacques a toutefois cité quelques initiatives locales d’utilisation des langues nationales développées dans certains pays dans le cadre des campagnes d’alphabétisation. D’autres initiatives ont été expérimentées pour introduire les langues nationales comme langues d’enseignement à l’école (écoles bilingues, écoles satellites, écoles franco – arabes…).

Au nombre des acquis figurent la codification et la transcription à partir des années 70, de certaines langues nationales, notamment celles qui sont les plus parlées, contribuant ainsi à la promotion de  l’alphabétisation et favorisant la naissance d’un système non formel de l’éducation qui s’est développé en parallèle au système formel dans la quasi-totalité des pays africains francophones. Pour le Secrétaire général, cette dualité, à savoir un système formel utilisant le français dès les premiers apprentissages et un système non formel utilisant essentiellement les langues nationales, est l’un des traits marquants des systèmes éducatifs en Afrique subsaharienne francophone.

En dépit de quelques expériences plus ou moins réussies comme la méthode « apprendre le français à partir des acquis de l’alphabétisation » (ALFAA), le Secrétaire général fera remarquer que l’absence de véritables passerelles entre les deux systèmes, formel et non formel, ne facilite pas l’utilisation des langues nationales dans le système formel.

Le multilinguisme est-il un atout ou une contrainte à l’introduction des langues nationales dans les systèmes éducatifs ?

En partageant sa réflexion sur cette problématique, le Secrétaire général a d’abord décrit le contexte de l’Afrique qui est un continent où le multilinguisme fait partir des réalités socio – culturelles en prenant l’exemple sur le Cameroun qui compte plus de 200 langues et le Burkina Faso, une soixantaine.

Au vu de cette réalité, des questionnements légitimes se posent : Dans quelles mesures peut – on mener les enseignements et les apprentissages dans la ou les langues nationales au niveau du système formel tout en préservant la cohésion sociale et l’unité nationale ? N’y a – t – il pas un risque de cultiver et d’exacerber le régionalisme ? Les coûts de cette réforme sont – ils soutenables ? Quelles stratégies faut – il développer pour avoir l’adhésion des communautés à l’utilisation des langues nationales dans le système éducatif formel ? Les langues nationales des pays d’Afrique subsaharienne sont – elles pour le moment en mesure de préparer les jeunes aux emplois décents dans le contexte de globalisation ou de mondialisation ?

Pour KI Boureima Jacques, le multilinguisme est un facteur qui contribue au renforcement de la diversité culturelle qui est une valeur universelle et un patrimoine mondial. Toutefois, dans le contexte de l’école, a priori, il semble être une contrainte.

Heureusement, dira-t-il, au vu des résultats de la recherche, cette contrainte est bien surmontable si un certain nombre de conditions sont réunies, notamment la volonté politique, l’engagement ferme des acteurs et experts, l’adhésion des populations, l’utilisation des langues nationales comme langues officielles en plus des langues étrangères, le financement assuré, un appui conséquent à la recherche sociolinguistique.

Le Secrétaire général a conclu son propos en notant que le multilinguisme n’est pas un obstacle en soi dans l’introduction et l’utilisation des langues nationales dans les systèmes éducatifs des pays d’Afrique subsaharienne ; mais certaines conditions de réussite doivent être réunies au préalable, notamment une bonne politique linguistique, une volonté politique, l’adhésion des populations bénéficiaires et des enseignants bien formés tant sur le plan linguistique que sur le plan pédagogique. Ce choix pour le bilinguisme et le multilinguisme doit tenir compte des langues étrangères qui font partir de l’histoire du continent (le français, l’anglais, l’espagnole, le portugais et l’arabe).